Europe : l’avenir est-il encore du côté des BRICS ?

Le Brésil est-il toujours attractif ?

Dans un précédent dossier, nous analysions les défis majeurs auxquels est confrontée l’Europe. Ballottée entre un traité transatlantique aux promesses fallacieuses et des relations tendues avec la Russie, l’Europe est à la recherche de nouveaux marchés pour écouler sa marchandise. On entend beaucoup parler du « bel avenir économique » entre la France et le Brésil, mais le « géant vert » est-il encore ce pays « à la croissance époustouflante » qui caractérise les BRICS ?

L’Europe en récession

« De très nombreux pays importants sont sans ambiguïté en récession/déflation, appelez cela comme vous le souhaitez », dit Charles Sannat dans son édito du 23/05. Portugal qui se vend à la Chine, Pays-Bas en récession (-1,4 %) et croissance nulle pour la France…
On rajoute à cela quelques chiffres catastrophiques sur la Grèce paru sur une infographie (jodi-graphics) : 1 million de personnes ont perdu leur travail, 30 % des entreprises ont fermé, 38 % des salaires ont baissé, 45 % des pensions ont été réduites… La liste est longue.
L’Europe a plus que jamais besoin de trouver de nouveaux marchés, et surtout depuis que la Russie a menacé l’Europe de couper les robinets de gaz à cause de sa prise de position atlantiste dans la crise ukrainienne. Vous pourrez revoir cela en détail dans notre précédent dossier consacré à l’Europe.

Le Brésil est-il l’avenir de la France ?

La France multiplie les actions en faveur du développement des relations commerciales et économiques avec le Brésil et la coopération économique entre les deux pays semble bien partie pour durer. Le partenariat (notamment technologique) conclu entre la France et le Brésil en 2006 est en plein essor, et le Forum économique franco-brésilien est là pour en témoigner. Il s’en est tenu un le 20 mai dernier à Paris. Ces Forums économiques franco-brésiliens ont pour vocation de déboucher sur des coopérations concrètes et de renforcer les échanges commerciaux entre les deux pays.

Mais comme le souligne le ministre du Développement, de l’Industrie et du Commerce extérieur du Brésil Mauro Borges, il reste du chemin à parcourir. Les échanges commerciaux bilatéraux n’ont représenté « que » 10 milliards de dollars en 2013, sur la balance commerciale du Brésil qui était de 500 milliards de dollars. La France, qui était le 5e investisseur étranger en 2010 a reculé au 8e rang en 2013.

Le Brésil est-il encore cette grande puissance des BRICS ?

Les BRICS, c’est un regroupement de pays (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) qui ont connu une croissance formidable parfois à deux chiffres, jusqu’à ces dernières années.
Or le FMI évoque à présent un « ralentissement prolongé » des BRICS.
L’Inde est passée d’une croissance à 8,5 % en 2009 à 4 % en 2013, la Chine de 11 % à 7,5 %, et c’est encore plus faible pour le Brésil. Selon banquemondiale.org, le pays a connu une croissance en dents de scie ces 5 dernières années :
– 2009 : -0,3 % ;
– 2010 : 7,5 % ;
– 2011 : 2,7 % ;
– 2012 : 0,9 % ;
– 2013 : 2,3 %.

Outre des ressources naturelles abondantes (le pays est autosuffisant pour le pétrole) et des secteurs industriels dynamiques (agroalimentaire, automobile, aéronautique et high-tech), le pays doit affronter des défis majeurs. Avec 16 % de personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté (2012), les inégalités sociales sont plus fortes que jamais.
Les nombreuses manifestations autour de la Coupe du Monde de la Fifa ne font que souligner ces problématiques d’inégalité, de violence et d’insécurité. Le pays est en pleine réforme structurelle que son administration très lourde n’aide pas à réaliser.

L’autre problématique majeure à laquelle est confronté le pays est la faiblesse du réal. Merveilleux pour le tourisme mais pas pour l’entrée de capitaux étrangers dont le Brésil a pourtant besoin pour financer ses importations. Avec un déficit record en 81 milliards de dollars du compte courant en 2013 et un tarissement des capitaux étrangers, l’inflation pèse sur la croissance du Brésil.
Bref, pas sûr que les réseaux Euro-BRICS soient une vraie réponse à la crise qui touche le monde entier.

L’avenir de l’Europe est-il à chercher du côté des MINT ?

Les nouvelles poules aux œufs d’or pourraient être à chercher du côté du Mexique, de l’Indonésie, du Nigéria et de la Turquie. Les MINT, dont les économies sont émergentes, représentent autant de nouvelles opportunités économiques, comme en leur temps les « 4 dragons » ou les « tigres asiatiques ». Nous vous invitons à lire sur ce chapitre l’excellent article d’analyse repris sur le site du Laboratoire Européen d’Anticipation Politique de Bruno Paul, auteur du blog Conscience Sociale.
Fine analyse, selon lui, « la tentative d’introduire les MINT (…) doit donc s’analyser comme un dernier effort désespéré pour éviter de continuer à parler des BRICS [une alliance qui a échappé au contrôle des États-Unis] et de parler à la place de pays émergents considérés comme de «futurs géants» et dont les gouvernements sont liés par un historique important (ressources en or et pétrole) et sont encore proches de Washington… ».
Ces pays, détenteurs de bons du Trésor américain, ne seraient en fait qu’une appellation d’économistes pour désigner « une extension géographique de l’influence américaine dans le monde ».

Pour Bruno Paul, la sortie de crise devrait plutôt passer par une nouvelle Union Latine, basée sur un système monétaire dual euro et or. À méditer !