Interview exceptionnelle !! Pierre Maillard, ancien conseiller diplomatique du général de Gaulle

Comme vous le savez, j’apprécie beaucoup le travail de l’un des confrères de la webosphère économico-politique, notre ami Olivier Berruyer. Notre camarade est allé interroger l’ancien conseiller diplomatique du général de Gaulle âgé de 98 ans. Je vous invite vraiment à lire cet article et à le partager sans modération pour informer et ré-informer sur ce qui se passe sur le front ukrainien.

Charles SANNAT

M. Maillard, quel regard portez-vous sur la crise en Ukraine ?

Il y a eu dans cette affaire une intervention initiale de la part de certains pays européens, qui ont déclenché un processus destiné à avoir des conséquences pour la situation de l’Ukraine.

Évidemment, l’Ukraine est depuis très longtemps – depuis la Russie soviétique et même bien avant –, dans la zone d’influence notoire de la Russie. L’Ukraine a ainsi fourni beaucoup de personnel politique – et du plus haut niveau – à la Russie. Ce pays est donc attaché à la zone d’intérêts particuliers de la Russie, en raison d’une très longue histoire.

Il est donc évident que cette intervention initiale – non pas dans la partie orientale mais dans la partie occidentale –, destinée à provoquer un rapprochement étroit entre l’Europe et l’Ukraine allait directement à l’encontre d’un intérêt stratégique très ancien de la Russie pour cette région.

N’est-ce pas irresponsable pour l’UE d’avoir agi ainsi ?

C’était en effet s’attirer certainement des objections ; la Russie n’a pas réagi immédiatement mais c’est certainement sans joie qu’elle a vu cette ingérence en vue de ce rapprochement qui aurait été consacré par des accords d’association.

D’autant que l’Ukraine de l’Est – notoirement russophone – est très liée économiquement à la Russie – contrairement à l’Ouest du pays. Il y a deux Ukraine en réalité…

L’Europe a donc réalisé une intrusion dans une sorte de « domaine réservé », de zone traditionnelle d’influence et d’action de la Russie. C’est un fait.

Auriez-vous conseillé au général de Gaulle d’agir ainsi ?

Sûrement pas ! Étant donnée la proximité que j’ai eue avec le Général, je peux vous garantir qu’il n’aurait JAMAIS agi ainsi !

S’il pensait qu’il était bon d’une manière générale que la Russie se rapproche de l’Europe – c’était sa vision à long terme –, je ne pense pas du tout qu’il aurait salué cette sorte d’accord et de rapprochement spécifique de l’ensemble de l’Ukraine avec l’Union européenne. Il aurait été là-dessus plus que réservé…

L’Europe semble se soumettre aux pressions américaines et ne pas prendre en compte ses propres intérêts stratégiques…

C’est certain.

Naturellement, il y a eu des influences multiples. Quelles ont été exactement dans ces initiatives des pays européens, les responsabilités des uns et des autres et les États-Unis ont-ils vraiment été à l’origine de la chose : ça je n’en sais rien, mais ils ont eu une certaine influence sans aucun doute.

N’êtes-vous pas étonné de l’espèce de russophobie qui s’empare des médias et donc de la population ?

Oui : ceci est tout à fait inapproprié !

Encore une fois : l’Ukraine est notoirement depuis très longtemps dans la sphère d’influence de ce qui fut l’URSS et ce qui est aujourd’hui la Russie. Elle a été en plus le berceau de nombreuses personnalités Russes – Khrouchtchev en particulier, que j’ai eu l’honneur de bien connaître lorsque j’étais auprès du Général. L’Ukraine est depuis très longtemps une zone d’influence dans la périphérie de ce que l’on appelait « Empire soviétique » et ce qu’on appelle aujourd’hui la zone d’influence russe. Il est donc fâcheux d’entrer dans une sorte de contestation vigoureuse de cette zone d’influence.

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