INTERNATIONAL : Grande interview de Sergueï Lavrov

C’est un peu long mais il est long d’exprimer la position officielle russe sur de nombreux sujets en moins de 140 caractères. Les Russes ne sont pas belliqueux… en tout cas leur sémantique l’est nettement moins que la nôtre.

Charles SANNAT

Diffusion en direct d’une interview du ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov aux radios Sputnik, Écho de Moscou et Ici Moscou. Le chef de la diplomatie russe répondra aux questions sur les actualités russes et internationales. L’interview est traduite en 28 langues.

13:00 Fin de l’interview du chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov.

12:59 Faut-il un gendarme mondial ?

« Il y a les forces de maintien de la paix de l’Onu. Il n’y a pas de raison d’introduire ce contingent en ukraine. »

12:58 Concernant l’intégration de la Crimée à la Russie :

« La décision concernant la Crimée a été prise après la violation de l’ensemble des accords conclus auparavant. Nos voisins nous comprennent parfaitement. »

12:55 Qui sont les alliés de la Russie ?
Nous avons des alliés au sein de l’OTSC, avec lesquels nous coopérons dans la sphère militaire. Nous avons des partenaires stratégiques, les pays de l’OCS et du BRICS. Les USA appellent certains pays à intégrer l’OTAN et à renoncer aux autres organisations, nous prônons le développement des relations avec tous les pays.

12:53 Concernant les recours de l’UE contre Gazprom

Lavrov : « Tous les contrats en vigueur ont été conclus en totale conformité avec le régime juridique en place au sein de l’UE à ce moment donné. Suite à l’adoption du Troisième paquet énergie, il y a eu des tentatives de présenter de nouvelles exigences concernant les anciens contrats, mais c’est inacceptable. Nous avons des arguments. »

12:51 Vous attendez-vous à une levée des sanctions dans un avenir proche ?
Je ne peux pas dire que cela me préoccupe particulièrement. Je suis préoccupé par le caractère des relations avec les États-Unis et l’UE. Nous devons diversifier notre production nationale, mais cela ne veut pas dire qu’il faille renoncer à la diversité que nous offrent les importations.

12:49 On dirait que le Conseil de sécurité de l’Onu est un impuissant. Pouvez-vous lui fournir du Viagra ?
Lavrov : Je ne suis pas d’accord (…). En deux ans, le Conseil a pris bon nombre de résolutions, notamment concernant les opérations de maintien de la paix en Afrique. Ces conflits sont connus, c’est un problème énorme, et le Conseil s’en occupe. Et souvenez-vous de la résolution sur les armes chimiques en Syrie. Il ne faut pas critiquer le droit de veto, c’est une partie du règlement des questions épineuses.

12:44 Sur la pilote ukrainienne Nadia Savtchenko emprisonnée en Russie

Lavrov : « Elle est accusée d’un crime gravissime. Elle a été arrêtée avant d’être élue députée, en outre l’immunuté ne s’applique que quand une personne rélise son activité professionnelle à son poste. Mme Savtchenko a accès aux diplomates et à des médecins. Sa sœur lui a rendu visite. J’espère que cela ne donnera pas lieu à des spéculations. »

12:41 Sur l’absence du président biélorusse à la parade de Moscou le 9 mai : on dirait que Loukachenko ne veut pas se compromettre en affichant une trop proche amitié avec la Russie. Qu’en est-il ?

Des unités biélorusses participeront à la parade de Moscou. M. Loukachenko participera aux événements festifs du 8 mai. Je n’ai pas la sensation que Loukachenko nous a « échangés » contre l’Europe.

12:40 Nous soutenons la normalisation des relations arméno-turques et arméno-azerbaïdjanaises. Nous faisons beaucoup à cet égard, notamment pour régler le conflit du Haut-Karabakh.

12:37 Les Américains ont proposé de réduire à nouveau les arsenaux nucléaires. Quelle est votre position sur ce dossier ?

Il y a une grande part de ruse là-dedans. Nous ne nous sommes pas fixé pour but de nous débarrasser de l’arme nucléaire, mais de rendre le monde plus sûr. Il faut tenir compte des nouvelles technologies. Par exemple, les USA conçoivent une arme hypersonique stratégique. Le but est de pouvoir frapper en n’importe quel point du globe en une heure. Les USA veulent déployer des armes dans l’espace. Nous et la Chine avons proposé un projet visant à empêcher le déploiement d’armes dans l’espace, les États-Unis sont les seuls à l’avoir refusé. Imaginons que les États-Unis ont un bouclier antimissile et une puissante arme hypersonique. C’est dangereux quand le bouclier et l’épée sont entre les mêmes mains. Il y a un immense déséquilibre au profit de l’OTAN dans la sphère des armes conventionnelles. On ne peut réduire les armes stratégiques qu’en prenant en compte ces facteurs.

12:30 Nucléaire iranien

Lavrov : « Les accords enregistrés avec Téhéran sont basées sur les propositions de la Russie et des spécialistes russes. Nous allons développer la coopération militaire et technique avec l’Iran. »

12:27 La Russie et l’Iran peuvent-ils créer une alliance militaire et politique ?
L’Iran est pays observateur de l’OCS. C’est une organisation non militaire, qui comprend des structures spéciales consacrées à la lutte contre le terrorisme. Ni nous, ni les Iraniens n’avons pas besoin d’une alliance militaire. Nous coopérons activement dans le cadre de l’OCS et des exercices à caractère antiterroriste.

12:21 Question venue du Mexique : Pourquoi la Russie ne déploie pas des armes nucléaires ou autres en Amérique latine ?
Il faut éviter toute action impliquant la prolifération des armes atomiques. Mais nos partenaires américains violent ce principe en Europe. C’est un risque sérieux pour le TNP. Nous ne considérons pas que nous devons renforcer notre influence grâce à la prolifération des armes nucléaires. Concernant la force nucléaire, nous souhaitons pouvoir réaliser les éventuelles missions en tout point du globe. Nous utilisons les aérodromes, le sports, et sommes prêts à examiner d’autre options.

12:17 Question : Ukraine, Yémen, La Russie passe son temps à se plaindre sur la scène internationale. Pourquoi ? 
Pourquoi se plaindre ? Vous me demandez comment nous évaluons la situation, et je vous dis que nos partenaires font la guerre au terrorisme de façon incorrecte. En Syrie nous avons fait notre possible pour éviter la répétition du scénario libyen. Avec la Chine, nous avons refusé la tenue d’un scénario lié à la force. On a adopté à Moscou la plateforme de Moscou en 10 points, où l’opposition s’est mise d’accord avec le gouvernement. Au Yémen, nous avons tout fait pour ramener la situation dans le cadre politique, et nous avons des alliés. Je ne veux pas vanter notre politique, mais les accords de Minsk ont porté une série de résultats.

12:09 Était-ce une erreur d’octroyer l’asile politique à Snowden ?

C’était une pure coïncidence, nous ne pouvions pas faire autrement. Je suis étonné que cela préoccupe les diplomates américains. Ils kidnappent nos citoyens, les emmènent de force sans nous prévenir. Snowden volait en transit en Amérique latine et devait faire une correspondance. Pendant qu’il volait, ils ont annulé son passeport. Il est resté et a demandé l’asile. Si M. Snowden souhaite quitter la Russie, il est totalement libre de le faire.

12:00 Vous êtes très populaire. Comptez-vous vous présenter aux élections présidentielles de Russie ?

J’aime mon travail. Je m’efforcerai de faire tout mon possible à ce poste.

11:58 Lavrov sur son image de fumeur invétéré : « Nous avons une bonne hygiène de vie… Je fume très peu »

11:56 Qui abattu le vol MH17 en Ukraine ? 

Je serais reconnaissant pour toute information permettant de faire la lumière sur cette tragédie. Les spécialistes malaisiens ont été admis sur les lieux de la catastrophe il y a relativement peu de temps, ils ont été aidés par des représentants des insurgés. Pourquoi cela n’a-t-il pas été fait plus tôt ? Les Pays-Bas ont publié des informations préliminaires et ont commencé à rechercher des témoins qui ont vu un missile Bouk sur le territoire ukrainien. Et pourquoi pas les autres témoins, ceux qui ont vu le vol d’un chasseur ukrainien ?

11:50 Les États-Unis ne voulaient pas laisser la Russie et l’UE approfondir leur partenariat, surtout entre la Russie et l’Allemagne. 

Le partenariat russo-allemand est nécessaire pour dépoussiérer l’UE. Pour que l’UE défende ses propres intérêts. Il est difficile d’interdire quelque chose à l’Allemagne, mais les USA font beaucoup d’efforts pour empêcher le rapprochement entre Moscou et Berlin. Il y a des faits que je ne peux pas dévoiler ici.

Les USA mènent un intense travail et appellent les pays d’Europe de l’est à détruire les monuments soviétiques.

11:49 La politique menée par les Américains au niveau mondial

« Un chaos contrôlé », selon Lavrov. « Ils refusent de voir émerger des régions ou pays qui n’ont pas besoin d’eux. »

11:45 Pourquoi n’y a-t-il pas d’Américains dans le format Normandie (pour le règlement de la crise en Ukraine) ? Faut-il les inclure ? Obama s’est dit prêt à y participer.

Lavrov : Le format de Normandie a été lancé par le président français François Hollande. Les accords de Minsk, non remplis par Kiev, ont été soutenus par tous. Si les USA soutiennent les accords de Minsk, ils ont la possibilité d’influencer la partie qui ne les remplit pas.

11:40 Question de l’ambassadeur US à Moscou : avec quel secrétaire d’État US était-il le plus agréable de travailler ?
Le travail était confortable avec tous. Les USA ont leur ligne d’activité, et elle ne correspond presque jamais complètement avec la ligne russe. Je suis à l’aise avec Kerry, avec Mme Rice, et d’autres. Un petit secret : Mme Allbright me permettait de fumer dans sa résidence.

11:37 Question sur les élites russes qui vivent à l’étranger et y envoient leurs enfants

Lavrov : « Ma fille travaille et vit en Russie. Aucun peuple ne peut progresser avec une élite composée de traîtres »

11:32 Question : « Le plein remplit le vide », telles est la stratégie chinoise. Est-ce une menace ?
Nous développons avec la Chine un partenariat stratégique dans tous les domaines. C’est la garantie de relations solides et amicales. Nous devons remplir les vides (régions peu peuplées d’Extrême-Orient, ndlr) nous-mêmes. Il faut tout faire pour développer la Sibérie et l’Extrême-Orient.

11:30 Menace liée à l’OTAN 

Côté ouest, rien de réjouissant. Nous avions de bons mécanismes de coopération avec l’OTAN, mais tout a été détruit. Il ne reste que le Conseil Russie-OTAN au niveau des ambassadeurs, mais il ne s’est réuni qu’une fois en un an. L’OTAN mène un nombre croissant d’exercices aux frontières russes, des armements sont déployés dans les pays de la Baltique.

11:27 Lavrov : « Aucune menace du côté de la Chine, pas de menace du côté de l’Orient »
Le partenariat russo-chinois revêt un caractère stratégique et renforce la stabilité internationale.

11:20 Menace terroriste

Lavrov : L’EI est notre principal ennemi à l’heure actuelle. Pourquoi les États-Unis coordonnent leur lutte contre l’EI avec les autorités de l’Irak, mais pourquoi refusent-ils tout contact avec le gouvernement syrien ?

Il faut lutter contre le terrorisme sans doubles standards. Au Yémen les USA ont soutenu la coalition arabe sans consulter le Conseil de sécurité.

11:15 Hillary Clinton a comparé ce que Poutine a fait en Ukraine avec ce qu’Hitler a fait en Pologne. Comment alors collaborer avec les politiciens américains ?

Ces propos ne rajoutent rien au mérite de Mme Clinton, mais Moscou travaillera avec Mme Clinton si elle est élue présidente. La Russie a de bonnes relations aussi bien avec les républicains que les démocrates aux États-Unis. Il faut créer des relations pratiques et ne pas renouer avec la rhétorique du passé.

11:13 Question d’un internaute français : Êtes-vous déçu par Obama ? Peut-on faire confiance aux USA ?

Comme disait Reagan, il faut croire, mais d’abord vérifier. Concernant Obama, il a eu le Prix Nobel de la paix, mais il a fait beaucoup de guerres, qui ne répondaient pas aux intérêts de stabilité de ces régions. Aujourd’hui, nous sommes préoccupés par l’État islamique, mais les USA ont refusé de les inscrire dans la liste des États terroristes. Ils ne veulent pas avouer que l’IE est le fruit de leurs activités en Irak, en Libye et en Syrie.

11:08 Question : Pourquoi la Russie ne veut-elle pas approuver l’existence de la Novorossia (régions insurgées de l’Ukraine) ?

En ce qui concerne la Novorossia, l’Ukraine peut exister comme un État unique qui couvre l’ensemble des régions, cultures du pays. Il faut faire en sorte que l’Ukraine reste unie, pour ne pas répéter le scénario de certains pays après la Seconde Guerre mondiale.

Le problème est celui des minorités. Il n’y a pas que des Russes, mais aussi des Roumains, des Tchèques, des Slovaques. Il faut refuser cette idée d’ukrainisation du pays et de ses minorités. Il faut décentraliser, et réaliser une réforme constitutionnelle, conformément aux accords de Minsk.

L’Ukraine doit rester unie et remplir ses engagements.

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